Love, love, love

Dans la série "Découvrons ensemble les traditions américaines", j'avais très envie d'écouter du gospel. Dimanche dernier, je suis donc allée à la messe. A la St. Augustine Catholic Church, s'il vous faut tous les détails.

D'abord, il faut que je vous raconte comment c'était beau, j'en ai presque pleuré. A la base, on venait plutôt en touristes, presque exclusivement pour la musique. Sur ce plan-là, on n'a clairement pas été déçues : le gospel, c'est vraiment beau, vivant, entraînant. Les Anglo-saxons ont une culture de la musique à l'église que l'on ne connaît pas en France. Ici, la moindre petite paroisse a un choeur digne de ce nom, avec des gens de tous les âges, des voix de toutes les tessitures. Ici, c'est normal de s'investir dans la chorale de son église, et de le faire avec sérieux. L'église dans laquelle je suis allée dimanche n'est ni la plus riche, ni la plus prestigieuse de Washington, et pourtant, le choeur n'était vraiment pas mauvais.

Mais il n'y a pas que la musique, en fait. La messe a duré une heure et demie, et je ne me suis pas ennuyée une seule seconde. C'est vivant, le prêtre fait des blagues et cite du Charlie Brown pendant son sermon.

Et l'ambiance est absolument dingue. D'abord, il y a trois messes le dimanche matin dans cette église, et on était quand même 200 pour celle à laquelle j'ai assisté. Je n'avais jamais vu une église aussi pleine un dimanche normal. Les gens tapent dans leurs mains pour accompagner le choeur, ils se lèvent spontanément parce que la musique est belle, il se donnent tous la main pour chanter le Notre Père. C'est la première fois que je voyais autant d'enthousiasme dans une église. Je crois même que c'est la première fois que je voyais des gens croire. Mais croire vraiment. Dans toute la beauté et la naïveté du mot. C'était beau, et très émouvant.

Et pour finir, il y a un côté communautaire un peu déroutant dans les églises américaines. En France, quand on parle de communautarisme, c'est toujours très négatif. On perçoit toujours ça comme un groupe qui se construit par le rejet des autres. Et je crois que c'est une image complètement fausse du communautarisme américain. Je parle bien sûr au vu d'une expérience très limitée (je ne suis allée qu'une seule fois à la messe, après tout) et mon opinion sera très certainement amenée à évoluer. En attendant, ici, on ne fréquente pas une église, mais on appartient à une église. D'ailleurs, on appartient à une église tout autant qu'à une Eglise. C'est-à-dire qu'on a à la fois une façon de croire et des gens avec qui l'on croit. La communauté religieuse ne se construit pas en rejet de ce qui n'y appartient pas, mais plutôt en solidarité avec ceux qui y appartiennent et en ouverture vers les nouveaux arrivants.

Mes copines et moi étions un peu gênées avant d'y aller, on voulait aller écouter la musique, et en même temps, on trouvait ça extrêmement impoli d'assister en touristes à une cérémonie religieuse sans y avoir été explicitement invitées. On avait fait attention à s'habiller de la façon la plus discrète possible, on s'est assises dans le fond, sur le côté. Bon, de toute façon, on était presque les seules blanches de toute l'assemblée, alors niveau discrétion, c'était un peu raté. Mais je dois avouer que personne ne nous a regardées de travers. Au contraire, les gens ont certes remarqué qu'on n'était pas des habituées, mais on n'a reçu que des sourires. A tel point que je me suis sentie trop gênée de ne pas connaître mon Credo et mon Notre Père en anglais, parce que du coup, j'ai eu l'impression de m'exclure toute seule en n'étant pas capable de participer.

Et à la fin de la messe, le prêtre a demandé à tous les gens qui venaient dans cette église pour la première fois de se lever, de donner leur prénom et l'endroit d'où ils venaient. Il a ajouté ensuite un petit mot de bienvenue. Raconté comme ça, vous devez trouver ça un peu sectaire, limite Alcooliques Anonymes. C'était très chaleureux. On n'avait pas très envie de se présenter et nos voisins nous ont poussé à le faire, en mode "ne soyez pas timides, on serait ravis de faire votre connaissance". Même quand vous êtes une française, blanche dans une église afro-américaine, ici, on vous souhaite la bienvenue.

Bon, j'ai peur que trop d'enthousiasme ne finisse par vous inquiéter, alors non, je ne vais pas changer et me mettre à aller à la messe tous les dimanches, je ne vais pas non plus adhérer à quelque chose qui depuis la France peut vous faire penser à une secte, rassurez-vous. Je ne partage cette expérience avec vous que parce qu'elle était belle, qu'elle m'a émue, et qu'elle a fait tomber un certain nombre de mes préjugés.

PS : La photo n'est pas de moi, évidemment. Elle a été récupérée quelque part dans les méandres de google images...

PS2 : J'ai essayé d'illustrer ce post avec une petite vidéo, mais ce fut périlleux : vous n'imaginez pas le nombre de vidéos de choeur amateur, mal filmées et avec un son pourri qu'on peut trouver sur youtube...